dimanche 28 avril 2013

Bien vivante !

              De retour après un long silence ! L'hiver s'est enfin fait la malle, les choses et les personnes retrouvent le sourire et moi, j'ai de nouveau envie de vous parler. Je ne sais pas vraiment par où commencer. Cette période hivernale a été, conformément à ce qu'ils disent tous, éprouvante, assez redoutable par moments. Mais je suis là pour tout vous raconter, et cet hiver pugnace n'a pas eu (totalement) raison de moi, et n'a pas altéré, mais alors pas d'un gramme, ma passion des livres. J'aime ce que je fais, et je continue à clamer que si je suis en hypokhâgne, ce n'est pas pour me tuer aveuglément à la tâche ou pour que ma tête s'envole comme une montgolfière mais bien pour explorer une minuscule partie, à ma minuscule échelle, de cette bibliothèque de Babel qui me fascine tant. Pour lire, pour réfléchir sur les livres, pour rencontrer de nouveaux personnages et croquer des mots.

            Toutefois, l'hiver m'a fait prendre conscience de certaines "limites" de la prépa que j'avais éludé jusqu'alors. J'en parlerai dans un article à venir. Pour l'instant j'ai simplement envie de vous parler de deux découvertes livresques de l'hiver.

            Le premier, le compagnon fidèle de ma sinistrôse hivernale : Anton Tchekhov. Le dépouillement, l'ennui, le désespoir mutique des personnages de l'Oncle Vania et de la Cerisaie m'ont giflé. Je ne saurais pas l'expliquer, c'est comme si ces personnages qui se taisent ou pleurent, qui boivent et qui restent assis, comme s'ils n'avaient rien trouvé d'autre que de vivre leur vide devant nos yeux, pour nous crier qu'ils existent, qu'ils bouillonnent, sous leur inanité apparente, pour nous supplier de ne pas les oublier. Lecture d'hiver par excellence, Tchekhov s'est fondu dans mon environnement : ces arbres squelettiques si mornes devant lesquels je passais tous les jours, ce ciel lourd, cette neige boueuse, ils se sont tous mis à parler, à me réciter du Tchekhov.

           Puis avec le départ du froid, c'est Shakespeare qui s'est invité chez moi. Shakespeare que je connaissais partiellement sans l'adorer et dont j'ai découvert deux pièces : Le Songe d'une nuit d'été et La Tempête. Qui m'ont happée dans un univers foisonnant, plutôt opposé à ce cher Tchekhov sous bien des aspects. Ces mondes magiques, fantaisistes et vaporeux ont quelque chose de consolateur après la réalité impitoyable de Tchekhov. Des fées, des esprits, du sommeil, des monstres, du théâtre dans le théâtre : dans ces deux pièces, tout n'est qu'un rêve merveilleux, parfois teinté d'angoisse et souvent jubilatoire.

"...Nos divertissements sont finis. Ces acteurs, 
j'eus soin de vous le dire, étaient tous des esprits :
Ils se sont dissipés dans l'air, dans l'air subtil.
Tout de même que ce fantasme sans assises, 
Les tours ennuagées, le palais somptueux, 
Les temples solennels et ce grand globe même
Avec tous ceux qui l'habitent, se dissoudront, 
S'évanouiront tel ce spectacle intemporel
Sans laisser derrière eux ne fût-ce qu'un brouillard.
Nous sommes faits de la même étoffe que les songes, 
Et notre vie infime est cernée de sommeil..."

La Tempête, Shakespeare.